Définition et enjeux

Construction et herméneutique d'une économie de la puissance humaine

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La création monétaire par le crédit

Seulement, cette théorie de la création monétaire par réserve fractionnelle a elle aussi ses limites : le ratio entre la monnaie effectivement en circulation – sous toutes ses formes, produits dérivés, financiers inclus – et la monnaie injectée par les prêts de la banque nationale ne correspond pas au ratio théorique de cette théorie. Les campagnes massives de QE, de quantitative easing, de prêts massifs des banques centrales aux banques privées, sont l'application de la théorie des intérêts composés (et infirment de ce fait cette théorie) : en prêtant des trilliards aux banques privées, les banques centrales auraient dû relancer le crédit, l'activité économique et la circulation monétaire or il n'en a rien été, même si, indéniablement, les créances publiques ont soutenu les cours de la bourse dans une mauvaise conjoncture. L'argent prêté par la banque centrale aux banques privées a été investi dans les bourses – notamment dans les produits dérivés les plus dangereux. Inversement, les périodes de fortes croissance du crédit privé, dans les années 2000, n'ont pas été des périodes de création monétaire des banques centrales par le crédit.

La création monétaire s'avère beaucoup simple (et beaucoup plus dangereuse du point de vue de l'économie productive) que cela. Dans le bilan d'une banque, les actifs et les passifs doivent s'équilibrer. Dans l'exemple de la création de monnaie-dette, les banques privées empruntent aux banques publiques (de leur point de vue, ce sont des passifs) et prêtent aux clients privés (de leur point de vue, ce sont des actifs). De manière générale, pour prêter, il suffit, d'un trait de plume, d'effectuer une opération comptable simple : créditer les passifs et les actifs d'une même somme – et tant pis pour les règles prudentielles au fondement de la théorie des réserves fractionnelles. La somme prêtée au client est créditée sur son compte. Le montant du compte du client crédité à hauteur de l'emprunt fait partie des passifs de la banque et des actifs du client (la banque doit cette somme au client titulaire du compte qui peut en disposer) et la dette du client fait partie des actifs de la banque et du passif du client (le client est tenu de la rembourser et cette dette est considérée comme un avoir de la banque). C'est la création monétaire par crédit privé. Ce type de création monétaire ne connaît aucune limite, aucune contrainte : il peut s'accélérer alors que les crédits de la banque centrale se tarissent et se ralentir alors que les vannes de la banque centrale sont grandes ouvertes.

Comme ce système monétaire repose sur le crédit avec intérêts, l'ensemble de l'argent créé par crédit est moindre que l'ensemble des crédits à rembourser. À une échelle macro-économique, les dettes ne sont remboursables que dans la mesure où le capital total augmente de … ε. Le coût pour l'emprunteur correspond à l'accumulation, à la rente pour le créancier. L'écart entre la création de dette et la création de monnaie correspond à une addition de valeur économique créée sans contre-partie dans l'économie du travail concret. Il s'agit donc d'une bulle, d'une pyramide de Ponzi. Les dettes sont du fait des taux d'intérêt impossibles à rembourser à long terme. Le jour de la faillite du système, des États, des institutions publiques, il y a un défaut, un effondrement, une destruction gigantesque de valeur économique, de patrimoine.



Par ailleurs, cette création monétaire par crédit privé va augmenter la monnaie en circulation à l'infini. Cet argent (surnuméraire, pourrait-on dire) va dans les secteurs les plus rentables pour le capital, il va là où les taux de profit sont les plus importants – dans les secteurs financier, dans des produits dérivés plus ou moins sophistiqués, dans l'assurantiel et, de manière encore plus dangereuse, dans l'immobilier.



La création monétaire par crédit, fût-elle le fait d'une banque centrale « indépendante », s'oppose à la création monétaire par monétisation dont nous avons vu que, pour peu qu’elle soit dévolue aux salaires, elle n'était pas nécessairement inflationniste. L'impossibilité de monétisation – comme en Europe, aux États-Unis ou au Japon – empêche toute politique publique ambitieuse et toute relance par le salaire. Cette politique d'impuissance des acteurs publics prolonge indéfiniment les crises (et les hauts profits de quelques uns).

Proposition 49
La création monétaire par crédit condamne les autorités publiques à l'impuissance et concentre les profits.
Proposition 50
La création monétaire par crédit entretient les bulles spéculatives et les crises économiques.