Définition et enjeux

Construction et herméneutique d'une économie de la puissance humaine

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La crise écologique


L'effondrement du capitalisme épuise les ressources. Les ressources psychiques individuelles, nous l'avons vu, mais aussi les ressources naturelles. Au premier rang des enjeux actuels, il faut compter la survie de notre espèce. Sans Terre, sans sol, sans animaux, sans minéraux, la terre devient inhabitable, l'humanité et ses civilisations disparaissent. Nous n'avons guère de planche de salut. Il nous faut sauver nos ressources à long terme. L'enjeu, pour ce faire, est de dissocier lesdites ressources du système qui est en train de les emmener dans son effondrement. Des mouvements de résistances existent mais ils sont souvent récupérés par la logique du système.

Paradoxalement, c'est la rareté capitaliste, l'appropriation des moyens de production, des ressources au premier rang desquelles le temps humain, qui pousse au gaspillage. Le gaspillage permet au propriétaire lucratif le bénéfice, le bénéfice pousse à externaliser les coûts environnementaux des pratiques économiques, c'est-à-dire que le propriétaire se déresponsabilise des conséquences des actes productifs, des actes économiques que son avidité pousse à commettre.

La démocratie économique est la condition nécessaire (mais non suffisante) à la maîtrise écologique de la production économique. Il faut que les gens en tant qu'êtres humains, puissent décider de la nature de la production économique au regard des conséquences écologiques qu'ils devront supporter. Mais, tant que la logique de la propriété lucrative n'aura pas été sacrifiée, c'est l'environnement qui le sera. Entre un choix responsable et ruineux et un comportement irresponsable et lucratif, l'actionnaire (ou, pire, ses mandants mielleux) n'hésitera pas une seconde : s'il achète des actions, c'est pour que cela rapporte.

Note 51. La décroissance
Nicholas Georgescu-Roegen évoque le deuxième principe de la thermodynamique pour évaluer l'économie5. Un système clos se dégrade en termes énergétique, c'est l'augmentation du principe d'entropie. Pour éviter cette dégradation, l'économiste propose de diminuer la production de valeur économique.

Sur le fond, on ne peut que souscrire à l'idée de ménager les ressources, de ne pas gaspiller ce qui nous permet de nous nourrir, de nous abreuver, de nous chauffer. Si l'on coupe tous les arbres, nous allons être glacés, etc.

Cependant, Roegen pêche, de notre point de vue, à trois niveaux.

1. L'économie n'est pas un système fermé. Nous avons vu que l'indistinction de la valeur économique ne pouvait être évitée précisément que parce ce que ce système était ouvert, qu'il trouvait son énergie à l'extérieur.

2. L'activité humaine ne doit être gérée et pensée de l'extérieur, avec un point de vue théorique, elle doit être approchée en situation, selon ce qu'elle amène (ou ce qu'elle ôte) aux humains concernés. En considérant l'activité humaine comme séparée du désir humain, des sociétés humaines et de l'environnement humain, l'économiste décroissant esquisse le portrait d'un humain séparé de ce qui fait l'humain, son désir et son environnement.

3. Le mouvement de la décroissance prône une diminution de valeur économique. Il confond la valeur économique et la valeur concrète, la production concrète et la production abstraite. Si l'on veut diminuer le coût environnemental de l'activité humaine – encore faut-il voir les choses sous cet angle comme nous l'avons déjà remarqué –, il ne faut pas diminuer (ou augmenter, d'ailleurs) la valeur économique produite mais il faut changer la nature de l'activité humaine concrète : quand nous sommes passés à l'euro, en Belgique, par exemple, le PIB a été divisé par quarante sans que rien ne change en terme d'empreinte environnementale. De même, si l'agriculture se convertit massivement à la production biologique, la valeur ajoutée du secteur agricole augmenterait alors que l'empreinte écologique de l'activité concrète agricole diminuerait.

Par contre, si l'on veut modifier le type d'activité concrète de l'humain, il faut non pas modifier quantitativement la production de valeur ajoutée mais en modifier les principes de production. Actuellement, les travailleurs sont soumis à l'aiguillon de la nécessité – soit ils obéissent à un employeur, soit ils sont exclus socialement – pour produire de la valeur ajoutée. Ce principe conditionne l'activité productive humaine au bon vouloir des employeurs mus par l'appât du gain. Si l'on ne s'attaque pas à ce principe, à la propriété lucrative, donc, ce qui organise l'activité concrète demeure inchangé et, du coup, les nuisances de l'activité concrète humaine demeurent inchangées et ce, quelle que soit l'évolution de la production de valeur économique.