Définition et enjeux

Construction et herméneutique d'une économie de la puissance humaine

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à ceux qui ont trouvé
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La surproduction

Nous avons parlé de cette contradiction dans une note. Nous n'y reviendrons que brièvement et, pour ceux que cela intéresse, nous invitons à relire la note sur la surproduction et sur la crise ci-dessus. Comme les agents économiques sont en concurrence, ils doivent comprimer leurs coûts pour l'emporter, pour être moins chers que leurs concurrents. Pour comprimer les coûts, nous avons vu que le seul levier efficace – à qualité de production inchangée – ce sont les salaires. Pour comprimer les salaires, on peut diminuer les prestations et les cotisations sociales, diminuer les salaries individuels, augmenter la quantité de travail pour un salaire inchangé (et donc diminuer le nombre de postes de travail rémunérés pour une même production concrète) mais, de toute façon, c'est la masse salariale qui est comprimée à un niveau macro-économique.

La compression salariale satisfait les employeurs individuellement mais collectivement, comme tous les clients des employeurs sont désargentés faute de salaire, ils perdent leur carnet de commande, leurs usines tournent à vide. Comme les usines tournent à vide, elles licencient, comme les travailleurs sont chômeurs, ils n'ont absolument aucune possibilité d'acheter quoi que ce soit et, comme plus personne n'achète quoi que ce soit, les usines ferment, etc.

C'est ce qu'on appelle une crise de surproduction. Nous avons expliqué que les crises de surproduction étaient une tendance lourde du capitalisme du fait de

- la concentration de richesse de l'accumulation

- l'augmentation du taux d'exploitation (pl/V)

- l'augmentation de la composition organique du capital (C/V) et marginalisation des salaires

- baisse du taux de profit (pl/C+V).

L'augmentation du taux d'exploitation et de la composition organique du capital est liée à la combinaison de la lutte contre la baisse du taux de profit (il faut baisser le V du dénominateur pour compenser l'augmentation du C) et de la concurrence (on ne peut augmenter les prix face à la concurrence).

Nous avons vu que l'effondrement est inéluctable et cyclique dans des autodafés géants de destruction de la valeur – et que même le keynésianisme qui avait pu limiter le taux d'exploitation, qui avait pu augmenter la part des salaires n'avait pu contrecarrer la tendance lourde à la baisse du taux de profit.

Proposition 154
Les paradoxes capitalistes ne détruisent que des forces extérieures. De ce fait, le capitalisme est un système subparadoxal : il ne disparaît pas de ses contradictions.
Proposition 155
Il est vain d'attendre du capitalisme qu'il s'effondre sous ses propres contradictions.
Proposition 156
Le dépassement du capitalisme ne peut se faire que par des éléments extérieurs et non subparadoxaux.


Note 44. L'impossibilité de la dialectique dans un système capitalisme
(9.8) figure du paradoxe (rappel)






Pourtant, si l'on considère la valeur de vérité de la violence sociale du capital, de la propriété lucrative et de l'accumulation, elle ne peut entraîner sa propre chute que si elle est paradoxale (voir 9.1 ci-dessus) ou elle ne peut entraîner la dynamique dialectique que si elle est traversée de réalités concomitantes irréconciliables (de contradictoires). Ce n'est pas le cas parce que le capitalisme est composé de réalités subcontraires, d'éléments différents mais compatibles. De ce fait, l'accumulation et la baisse du taux de profit, la course à la productivité et l'assèchement du pouvoir d'achat des clients vont de pair.



Ils ne font pas disparaître le capitalisme parce que ce ne sont pas des réalités contradictoires mais subcontraires : les propositions (capitalisme – extérieur au capitalisme) ne sont pas contradictoires mais leur négation est paradoxale (non capitalisme – non extérieur au capitalisme). L'aspect paradoxal de la négation du capitalisme rend cette négation impossible, ce qui obère toute dynamique dialectique liée aux tensions entre les composantes en présence. Les tensions se résolvent dans des crises cycliques de production, des catastrophes économiques, des innovations technologiques, des faillites, la conquête de nouveaux marchés (nouveaux parce que liées à des pays hors capitalisme ou à des désirs jusqu'alors extérieurs à ce mode d'organisation de la violence sociale), des famines locales, des défauts, des crises de la dettes, des crash boursiers sans que jamais le système lui-même ne trouve dans l'opposition de forces en présence le dynamisme de son évolution dialectique ou dans la force de ses antagonismes internes la source de son effondrement. Ce système perdure en nuisant profondément à ce qui lui est extérieur. Pour dépasser les cycles ravageurs du capitalisme, il ne faut pas compter sur une force interne – dialectique ou paradoxale – puisque les choses fonctionnent sur le mode subparadoxal mais il faut attendre le salut d'un extérieur, de quelque chose qui n'est pas partie prenante de la logique du système de violence sociale capitaliste, salut qui doit venir avant que cet extérieur ne soit intégré à la dynamique d’absorption du capitalisme.


À force d'accumuler les subcontraires, le capitalisme cultive la faiblesse, l'impuissance des agents économiques et de leurs outils productifs : la schizophrénie, l'injonction paradoxale9, la dissonance cognitive10 marquent la cohabitation des subcontraires, poussent à l'impuissance, tétanisent les acteurs économiques enschémés dans des réseaux de perception distincts, dans des intérêts sociaux subcontraires.